Le 1er janvier 2018, la majorité des entreprises belges pourront intenter collectivement une action en cas de préjudice de masse causé par une même entreprise. Voici ce qui va changer.
Depuis fin 2014, la procédure en réparation collective (également appelée class action), a été introduite dans la législation belge. Elle permet aux consommateurs de faire réparer tout dommage lié à une faute contractuelle. La procédure juridique est prise en charge par un représentant agréé sans but économique (une association de consommateurs par exemple).
Un avant-projet gouvernemental prévoit une extension du domaine d’application aux indépendants et entreprises employant moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires est inférieur à 50 millions d’euros.
Quand ? Le texte devrait entrer en vigueur après approbation par le parlement fédéral le 1er janvier 2018. La procédure juridique sera alors prise en charge par un représentant de groupe agrée (les organismes interprofessionnels reconnus par le Conseil supérieur des Indépendants et PME).
Divergence des représentants des entreprises
Dans le Sud du pays, l’UCM (Union des Classes Moyennes) y voit principalement une possibilité pour ces derniers de défendre leurs droits et obtenir réparation de leur préjudice plus efficacement. Son avis a priori est favorable.
De son côté, la Fédération des Entreprises de Belgique est plus attentiste. Elle craint les dérives du système nord-américain (risques accrus de procès et primes d’assurances à la hausse). Le risque est toutefois limité, les dommages extracontractuels n’étant ici pas pris en considération. Ne pas s’y méprendre : la FEB ne s’oppose pas au principe mais réclame une analyse plus approfondie et un débat associant toutes les parties.
La plupart des acteurs impliqués dans cette modification de la législation sont au moins d’accord sur un point : tous privilégient une solution négociée directement entre les parties, sans intervention du système judiciaire, plus rapide et moins onéreuse.
15.07.2019
La « nouvelle » société anonyme à la loupe
Le Code des sociétés et des associations a été revu de fond en comble. Si la SA a survécu à la réforme, elle a tout de même subi un sérieux lifting. Voici les principaux changements...
Après un long parcours législatif, la grande refonte du droit des sociétés et des associations est entrée en vigueur le 1er mai dernier. Une véritable révolution visant à moderniser et à simplifier le fonctionnement de la vie économique en Belgique. C’est la réduction du nombre de formes juridiques de sociétés qui a tenu le haut du pavé en passant d’une vingtaine à seulement six. Une cure d’amaigrissement à laquelle a résisté la société anonyme. Mais celle qui reste le « véhicule » juridique de référence pour les grandes sociétés et les entreprises cotées n’a pas échappé à de multiples changements…
Les intentions ? Simplification et flexibilité…
Cette volonté est d’abord visible dans la modification des modalités de création, puisque désormais un seul actionnaire suffit pour fonder une SA. Autre allègement ? La possibilité de nommer un seul administrateur à la tête de l’entreprise, contre un minimum de trois (ou deux, dans le cas de seulement deux actionnaires) auparavant.
C’est l’ensemble de la gouvernance de la SA qui a été revue pour rendre son fonctionnement plus aisé. On notera ainsi les trois modèles de gestion possibles : l’approche avec un seul administrateur, un système moniste avec uniquement un conseil d’administration (solution par défaut) ou encore la version dualiste. Cette dernière est alors constituée par deux organes ayant chacun des missions spécifiquement attribuées par la loi : un conseil de surveillance et un conseil de direction. Soulignons que dans cette gestion bicéphale, les doubles mandats sont désormais interdits…
Toujours dans une démarche de simplification, le rachat d’actions propres est rendu plus aisé, puisque le plafond limitant à un maximum de 20 % a été supprimé. Mais l’opération demeure inscrite dans un cadre de règles strictes afin de veiller à l’égalité de traitement des actionnaires et pour garantir la transparence au moment d’une éventuelle revente des actions.
Plus de liberté !
C’est l’un des grands changements portés par la réforme : la possibilité de déroger au principe « une action, une voix ». Même s’il reste la règle par défaut, les entreprises non cotées peuvent désormais choisir d’émettre des actions sans droit de vote ou à l’inverse avec un droit de vote multiple (sans limite). Voire des actions avec un droit de vote lié à des situations spécifiques ou « préférentiel » dans le cadre, par exemple, d’une augmentation de capital. Autrement dit ? Une importante marge de manœuvre… Mais il faudra procéder à une modification des statuts et obtenir 75 % des voix pour mettre ce mécanisme en place.
Du côté des SA cotées en bourse, les options sont moindres. Les actions peuvent toutefois être émises avec un double droit de vote. Mais à condition que celles-ci soient nominatives, entièrement libérées et détenues par le même actionnaire au moins depuis deux ans. En cas de transfert, ce deuxième droit de vote s’évapore (sauf exception : transferts familiaux et intragroupes). Une majorité des 2/3 est requise pour mettre en place ce système… qui, selon les experts, pourrait inciter les entreprises étrangères à demander une cotation sur Euronext Bruxelles.
La responsabilité des administrateurs ? Plus limitée…
Entre autres pour rendre la Belgique plus attractive aux yeux des hauts profils étrangers, le législateur a prévu l’allègement de la responsabilité des administrateurs. Un plafond est désormais mis à cette responsabilité, , tant vis-à-vis de la société que des tiers et quel que soit le fondement de l’action (contractuel ou extracontractuel). Celui-ci varie en fonction de la taille de l’entreprise : jusqu’à 250.000 euros pour les « petites » structures et au maximum 12 millions d’euros pour les grandes. Des limites qui portent des exceptions… Par exemple ? En cas de fautes légères présentant dans le chef de l’auteur un caractère habituel, de faute grave, d’intention frauduleuse ou à dessein de nuire, de dettes fiscales et sociales, ou de fraude fiscale grave.
Siège statutaire : moins d’incertitudes
La Belgique adopte désormais le siège statutaire comme élément de définition de la nationalité de l’entreprise. C’est donc bien le siège social repris dans les statuts — et non plus celui du lieu d’installation de la principale unité selon la théorie du « siège réel » — qui détermine désormais le droit applicable à l’entreprise. L’objectif ? Permettre aux sociétés belges, disposant d’une entité opérationnelle à l’étranger, « d’emporter » avec elles la législation belge. L’inverse est évidemment vrai… Les sociétés étrangères tomberont sous le coup de leur propre réglementation. Cette nouvelle approche clarifie les choses, car, auparavant, il n’était pas toujours évident d’identifier le siège opérationnel réel. Une sécurité juridique accrue qui devrait également rassurer les entreprises, notamment lors du transfert d’un pays à l’autre. Rappelons qu’en matière fiscale, la théorie du « siège réel » reste de mise…
La transition est en cours…
Ce nouveau cadre légal est donc d’application depuis le 1er mai 2019 pour la constitution de toute nouvelle société ou association. Pour toutes les entreprises déjà existantes, la date à retenir est le 1er janvier 2020 (sauf si elles font usage de leur « opt-in » avant cette date), puisque certaines règles de la réforme leur seront applicables à partir de la prochaine année. Notons qu’une période transitoire a été prévue — entre 2020 et 2023 — pour permettre à toutes structures existantes de revoir leurs statuts et leur forme juridique. Certaines situations exigeront également l’adaptation des conventions d’actionnaires ou de management. Une actualisation qui devra être réalisée au plus tard le 1er janvier 2024. Un délai qui peut s’avérer utile pour mener une réflexion profonde sur les nouveaux habits juridiques de l’entreprise…
05.06.2019
Nul ne retient une entreprise… décidée !
Trancher un problème avec qualité n’est pas une mince affaire. Pourtant, les dirigeants doivent prendre des décisions dans un environnement toujours plus complexe et accéléré. La vision des experts de McKinsey…
Les dirigeants sont-ils prêts à décider ? La question est fondamentale, car nous vivons une époque de profondes mutations, où les opportunités sont aussi importantes que les dangers. Ce qui fait de la prise de décision un processus central et aux conséquences décisives pour l’avenir des entreprises. Dans une enquête en ligne, réalisée par la société de conseil McKinsey & Company auprès d’un millier de responsables à travers la planète, seuls 20 % d’entre eux affirment que leur organisation excelle dans ce domaine. Sans oublier qu’une majorité estime que leur organisation utilise inefficacement le temps consacré à cette tâche, engendrant des coûts et des effets néfastes sur la productivité. Dans ce contexte, comment mieux décider ?
Quelles décisions ?
Pour bien comprendre l’enjeu, McKinsey établit une typologie fondée sur trois grands types de décisions :
- Les « grosses mises » : plus rares, mais à fort impact, ces décisions sont prises par le conseil de direction et ont pour vocation de façonner l’avenir de la société (acquisition, allocation annuelle de ressources, etc.) ;
- Les « décisions transversales » : leur portée est importante, mais elles sont plus régulières et souvent composées de « sous-choix » interconnectés et pris par différents groupes de la structure à l’issue d’un processus collaboratif ;
- Les « décisions déléguées » : très fréquentes, celles-ci pèsent moins sur la destinée de l’organisation, mais, du fait de leur multiplicité, leur valeur ne peut pas être négligée. Ces décisions reposent souvent sur une seule personne ou une équipe.
Ne pas confondre vitesse et précipitation
Selon McKinsey, on ne peut pas dissocier rapidité et efficacité des décisions. Ce serait même la combinaison idéale pour soutenir au mieux la performance globale de l’entreprise. Pourtant, d’après l’enquête, bon nombre d’organisations peinent à se prononcer promptement. Une lenteur décisionnelle qui finit par peser sur la qualité des choix opérés. Ce n’est donc pas un hasard si les « bons élèves » du sondage disposent généralement de processus permettant de trancher sans délai. Ce qui représente un atout incontestable dans un environnement accéléré. Une célérité qui doit également aller de pair avec la vitesse d’exécution des décisions prises…
À chaque décision son approche…
Réussir son processus décisionnel repose sur une démarche adaptée pour chaque catégorie de décision, en fonction de ses caractéristiques, de son impact, des acteurs concernés, etc.
- Les « grosses mises » : l’idée est de leur accorder l’importance qu’elle mérite et de les transformer en un lieu de débat contradictoire, mais productif. La qualité des échanges est cruciale, c’est pourquoi le board a tout intérêt à assurer la diversité des participants, à confronter ses hypothèses de départ (désigner un ou plusieurs « avocats du diable ») et à chercher un consensus final le plus large possible ;
- Les « décisions transversales » : il est fondamental de « libérer » le pouvoir du processus décisionnel. Autrement dit, clarifier tous les mécanismes qui permettent de trancher efficacement lors des réunions : définir les objectifs, les cibles, les rôles et responsabilités de chacun, etc. Un exemple de mesure d’efficacité ? Fixer un temps clairement identifié pour la prise de décision lors des réunions, surtout si elles sont récurrentes. Une réunion qui ne débouche pas sur une décision ? Il faut peut-être penser à la supprimer.
- Les « décisions déléguées » : l’objectif premier consiste à provoquer l’engagement des parties prenantes, plutôt que d’obtenir leur consensus. L’un des facteurs de succès repose sur le fait de donner la responsabilité de décision aux acteurs du terrain, sur le principe de « ce sont ceux qui font qui savent ». Cela implique également de créer un environnement dans lequel les employés peuvent échouer « en toute sécurité » et formuler des directives claires indiquant, par exemple, le moment propice pour « escaler » une décision. Une approche qui permet généralement d’obtenir de meilleurs résultats, plus rapides et efficaces, tout en renforçant l’engagement et la responsabilisation.
Si plusieurs bonnes pratiques peuvent guider les entreprises, il apparaît également crucial d’identifier les facteurs qui peuvent ralentir la prise de décision ou en réduire la qualité : trop de parties prenantes, déficit d’engagement, manque d’agilité de la structure, etc. Une « introspection » représente donc une première étape salutaire…
17.04.2019
L’empreinte eau : un challenge de plus pour les entreprises
La durabilité devient une priorité pour la plupart des acteurs économiques. Mais cet enjeu ne peut pas se cantonner à la décarbonisation. ‘L’empreinte eau’ doit également être prise en considération.
Les enjeux climatiques sont plus que jamais sur le devant de la scène. Et les acteurs économiques s’en saisissent de plus en plus… Par exemple, ce n’est pas un hasard si 75 % des entreprises belges estiment qu’investir dans la Responsabilité sociétale de l’Entreprise (RSE) constitue une stratégie gagnante à terme. Figure de proue de la transition durable, l’empreinte carbone est au cœur des initiatives mises en place par les entreprises.
Le ‘CO2’ qui cache ‘l’eau’
Une stratégie RSE doit être globale. Or, le bilan carbone a tendance à concentrer toutes les attentions, au point d’occulter d’autres indicateurs mesurant la pression exercée par les sociétés humaines sur l’environnement, tels la biodiversité, l’utilisation des ressources, la pollution des sols ou encore ‘l’empreinte eau’. La lutte contre le réchauffement climatique ne peut donc pas se réduire à une vision partielle de la question… Dans ce sens, l’eau est un enjeu crucial, tant les conséquences des dérèglements sont importantes : sécheresse, désertification, inondation, maladies, etc. L’eau est incontestablement une ressource stratégique, notamment pour les entreprises, mais plus largement pour l’ensemble de la planète. Selon les projections de l’Organisation des Nations Unies, 40 % de la planète pourrait ainsi faire face à des déficits en eau douce à l’horizon 2030.
‘L’empreinte eau’, un indicateur clé
Celui-ci peut se définir comme le volume total d’eau nécessaire pour produire des biens et des services. On sait, par exemple, qu’il faut 11 000 litres d’eau pour fabriquer un jean en coton. Cet indicateur évalue donc l’eau utilisée de manière directe ou indirecte, en partant de la consommation de matières premières jusqu’à la fin de vie du produit. Lorsqu’on mesure ‘l’empreinte eau’, on peut distinguer trois catégories différentes :
- l’eau bleue, c’est-à-dire l’eau douce de surface ou souterraine ;
- l’eau verte, à savoir les eaux de pluie stockées dans le sol ;
- l’eau grise, autrement dit polluée par les processus de production.
À l’instar de l’empreinte carbone, l’objectif de cet indicateur est de sensibiliser et de responsabiliser, tant les particuliers que les gouvernements, sans oublier les entreprises. Et pour cause, ces dernières consomment près de 40 % de l’eau utilisée dans les pays développés.
Une prise de conscience, mais peu d’actions
Comment les entreprises prennent-elles en charge leur ‘empreinte eau’ ? La société américaine Ecolab et l’organisation GreenBiz, acteur mondial de la durabilité, ont tenté d’y répondre dans une étude décryptant la façon dont 86 grands groupes (avec des revenus supérieurs à un milliard de dollars) prennent en charge la thématique. Principal constat : même si la plupart de ces grands acteurs ont pris conscience des enjeux, ils peinent à transformer leurs objectifs ‘eau’ en actions concrètes.
- Ainsi 74 % de ces corporates affirment que l’eau devient une priorité incontournable, 59 % sont conscientes de l’augmentation du risque business et près de 90 % d’entre elles déclarent vouloir agir pour mesurer et gérer leur impact sur l’eau au cours des 3 prochaines années.
- Pourtant, des paroles aux actes, le fossé est encore grand : 44 % de ces groupes n’ont aucun plan d’action pour atteindre des objectifs chiffrés et seulement un peu plus de la moitié ont mis en place des outils intelligents de monitoring de leur consommation d’eau.
L’engagement, facteur clé !
Des résultats dans la continuité d’une enquête de 2017, dans laquelle 82 % des entreprises disaient manquer d’outils pour agir sur leur ‘empreinte eau’. Malgré ce déficit d’instruments, le premier levier d’action reste ‘l’engagement’ de l’ensemble des parties prenantes. En effet, le décalage entre objectifs et résultats naît principalement de l’écart de conscience entre ceux qui fixent les objectifs chiffrés — direction ou équipe RSE — et ceux qui doivent mettre en pratique le changement. Ainsi près de 40 % des entreprises rencontrent des difficultés à impliquer et mobiliser leurs acteurs de terrain.
Pour embarquer tout le monde dans cette aventure, il faut d’abord passer par la formation et la sensibilisation des collaborateurs. Mais aussi par la conscientisation des parties prenantes externes : clients et fournisseurs. Les réflexions et plans d’actions des entreprises doivent donc de plus en plus intégrer la dimension ‘eau’ dans leurs approches, notamment marketing (sans tomber dans les travers du greenwashing) pour évangéliser les consommateurs et dans le choix des partenaires de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
09.04.2019
Feu vert pour le nouveau droit des sociétés et associations
À partir du 1er mai 2019, un nouveau cadre légal s’appliquera aux sociétés et associations belges.
Le 28 février, la Chambre des représentants a approuvé le projet de loi introduisant le nouveau Code des sociétés et des associations. Son but ? Moderniser le cadre juridique actuel, coller davantage au terrain et permettre aux entreprises belges de mieux rivaliser avec leurs consœurs européennes.
Qu’est-ce que cela implique concrètement ?
Le nouveau cadre légal s’appliquera dès le 1er mai 2019 à toutes les sociétés et associations nouvellement constituées, et à partir du 1er janvier 2020 à toutes les sociétés et associations existantes (sauf si elles font usage de leur 'opt-in' avant cette date). La plage de conversion principale se situera sans doute entre 2020 et 2023. Au cours de cette période, toutes les sociétés et associations existantes devront revoir leurs statuts et leur forme juridique.
Un retard sans conséquence
La nouvelle législation aurait dû entrer en vigueur le 1er janvier 2019, mais l’approbation du projet de loi a pris du retard en raison des événements politiques des derniers mois (suite à une motion de défiance écolo-socialiste, le Premier ministre a présenté la démission du gouvernement le 18 décembre 2018, ndlr). Cette nouvelle loi a, à présent, été approuvée par la Chambre, mais elle n’a pas encore été publiée au Moniteur. Il faut aussi attendre les arrêtés d’exécution. Quoi qu’il en soit, la réforme deviendra effective au 1er mai de cette année.